L'aïkido traditionnel
un art basé sur l'énergie le ki
1. Ameno Tori Fune (天之鳥船) et Furitama (振魂)
Ameno Tori Fune (天之鳥船) et Furitama (振魂) :
Sons sacrés et kototama dans l’aïkido traditionnel
1. Ameno Tori Fune (天之鳥船) : Le bateau céleste des dieux
Kanji : 天 (ten, ame, ciel) · 鳥 (tori, oiseau) · 船 (fune, bateau)
Signification :
« Ameno Tori Fune » évoque dans la mythologie japonaise un bateau céleste, souvent
associé au voyage des kamis (esprits divins) entre le ciel et la terre.
Dans le shintoïsme, ce symbole représente la connexion entre les mondes visible et
invisible, le
sacré et le profane.
Dans la pratique spirituelle et martiale, ce terme est aussi lié à des incantations
(norito) et à des chants sacrés (uta) utilisés pour purifier l’espace, harmoniser
l’énergie, et invoquer la protection divine.
Morihei Ueshiba, fondateur de l’aïkido,
s’inspirait de ces traditions pour ancrer sa discipline dans une dimension spirituelle
et énergétique.
Ameno Torifune est bien plus qu’un simple échauffement : c’est un exercice de
méditation en mouvement, une porte d’entrée vers la compréhension du
ki et de l’aiki. Il
permet de cultiver la sensibilité , la fluidité et
la puissance sans force, valeurs fondamentales de l’aïkido.
Influence du Daito-ryu :
Morihei Ueshiba, fondateur de l’aïkido, a
intégré cet exercice à partir d’anciennes pratiques de
Daito-ryu aiki-jujutsu, où il servait à développer la
puissance interne (aiki).
Torifune tanden no ho :
Variante plus avancée, avec un travail spécifique sur le tanden
(centre énergétique situé sous le nombril).
But de l’exercice
Développer le ki :
Apprendre à sentir, accumuler et diriger l’énergie interne.
Améliorer la respiration :
Synchroniser mouvement et souffle pour une meilleure concentration.
Renforcer le centre (hara) :
Travailler l'ancrage, l’équilibre, la stabilité et la puissance issue du ventre.
Harmonisation :
Se connecter à soi-même et à son environnement, principe central de l’aïkido.
2. Furitama (振魂) : L’éveil de l’âme par le son
Kanji : 振 (furu, secouer, vibrer) · 魂 (tama, âme, esprit)
Signification :
« Furitama » désigne littéralement « secouer l’âme » ou « faire vibrer l’esprit ». Cette
pratique, issue du shintoïsme et du kototama, utilise la puissance des sons, des
syllabes et des mantras pour purifier, revitaliser et aligner l’énergie vitale (ki).
Dans le contexte de l’aïkido, le furitama est une méthode de respiration et de
vocalisation visant à :
Harmoniser le ki (énergie vitale) avec l’univers ;
Renforcer la présence martiale (zanshin) ;
Purifier l’esprit avant et après la pratique.
Kototama : Le pouvoir créateur des sons et des voyelles
Kototama (言霊) signifie
« l’esprit des mots » ou « l’âme du langage ». Cette tradition
japonaise ancienne enseigne que les sons, en particulier les voyelles, possèdent une
puissance créatrice et transformatrice.
Les cinq voyelles japonaises (a, i, u, e, o)
correspondent aux cinq éléments (bois, feu, terre, métal, eau) et aux cinq directions
(est, sud, centre, ouest, nord).
A (阿) : création, ouverture, énergie vitale ;
I (伊) : intention, concentration ;
U (宇) : réception, transformation ;
E (江) : harmonie, équilibre ;
O (於) : achèvement, retour à l’unité.
Morihei Ueshiba intégrait ces principes dans sa pratique, utilisant des incantations et
des chants pour canaliser le ki et manifester l’unité avec l’univers (aiki).
4. L’influence des sons voyelles dans l’aïkido traditionnel
Dans l’aïkido de Ueshiba, la voix et le souffle (kokyu) sont des outils essentiels :
Les kiai (cri martiaux) et les mantras (comme « A-O-U-M »)
sont utilisés pour focaliser l’énergie et perturber l’équilibre de l’adversaire.
Les chants sacrés (uta)
et les prières (norito) sont récités pour purifier le dojo et invoquer la protection des
kamis.
La respiration synchronisée
avec les mouvements permet d’unifier le corps et l’esprit, principe central de l’aiki.
Ueshiba enseignait que la maîtrise du kototama et des voyelles permettait de
transcender la technique pure pour atteindre une dimension spirituelle et martiale
supérieure.
5. Importance dans la pratique de Morihei Ueshiba
Pour Ueshiba, l’aïkido n’était pas seulement un art martial, mais une voie (do) de
purification et d’harmonisation avec l’univers. Le furitama, le kototama et les sons
voyelles étaient des outils pour :
Développer la sensibilité au ki ;
Créer une connexion avec le divin ;
Transformer le conflit en harmonie (masakatsu agatsu : « la victoire sur
soi-même »).
Il disait :
« L’aïkido est la voie de l’harmonie des énergies de l’univers. Les sons
sacrés sont les clés pour ouvrir cette porte. »
Conclusion
Ameno Tori Fune, Furitama et Kototama
sont des piliers de la spiritualité martiale de
Morihei Ueshiba. En intégrant ces pratiques, l’aïkido traditionnel dépasse la simple
efficacité technique pour devenir une quête d’unité, de paix et de connexion avec le
sacré.
La position de Morihei Ueshiba sur la nature non religieuse de l’aïkido est souvent
citée, notamment à travers sa célèbre phrase :
« L’aïkido n’est pas une religion, mais
une voie (do) pour purifier l’esprit et le corps. »
Cependant, cette déclaration ne nie pas l’influence profonde des traditions spirituelles
japonaises (shintoïsme, kototama,
omoto-kyo) sur sa pensée et sa pratique.
Aïkido, spiritualité et religion : la position de Morihei Ueshiba
1. L’aïkido n’est pas une religion, mais…
Ueshiba insistait sur le fait que l’aïkido n’était pas une religion au sens dogmatique
ou institutionnel.
Il ne demandait pas à ses élèves d’adhérer à un culte, à des rituels
obligatoires ou à une foi particulière.
Pour lui, l’aïkido était avant tout
un art martial et une voie d’éveil accessible à tous, quelle que soit
la croyance personnelle.
Cependant, il puisait abondamment dans le shintoïsme, le kototama, et les enseignements
de l’omoto-kyo (mouvement spirituel japonais dont il était proche) pour forger sa vision
de l’aïkido. Ces influences se retrouvent dans :
La terminologie (aiki, ki, kototama, furitama) ;
Les rituels (purification, chants, méditation) ;
La philosophie (harmonie, non-violence, unité avec l’univers).
2. Kototama, furitama, ameno tori fune : des outils, pas des dogmes
Ueshiba utilisait
le kototama et le furitama non comme des actes
religieux, mais comme
des
méthodes pratiques pour :
Développer la concentration ;
Harmoniser le corps et l’esprit ;
Améliorer l’efficacité martiale (par la respiration, le kiai, la
visualisation).
Par exemple, les sons voyelles ou les incantations comme « A-O-U-M » étaient pour lui
des moyens de focaliser le ki, pas des prières au sens religieux.
De même, le concept d’ameno tori fune (le bateau céleste) était une métaphore de la
connexion entre le ciel et la terre, une image poétique et énergétique, pas un objet de
vénération.
3. La spiritualité comme fondement, pas comme religion
Ueshiba distinguait clairement :
La spiritualité :
recherche de sens, purification, harmonie, développement personnel ;
La religion :
adhésion à un dogme, à des rites, à une institution.
Pour lui, l’aïkido était une pratique spirituelle (au sens large) parce qu’elle vise à
transformer l’individu, mais sans imposer de cadre religieux.
Il disait souvent :
« L’aïkido est pour tous, quels que soient la nationalité ou la religion. »
4. Pourquoi cette confusion persiste-t-elle ?
Le contexte historique :
Ueshiba a évolué dans un Japon où shintoïsme, bouddhisme et traditions
populaires étaient intimement mêlés.
Ses références à ces traditions étaient naturelles, mais pas exclusives.
La dimension mystique :
Ses écrits et ses discours sont parfois teintés de mysticisme, ce qui peut
donner l’impression d’une dimension religieuse.
Pourtant, il s’agissait pour lui d’une expérience personnelle, pas d’un
enseignement à suivre aveuglément.
L’héritage de l’omoto-kyo :
Bien qu’il ait pris ses distances avec ce mouvement, certaines de ses idées
(comme l’importance du kototama) sont restées dans sa pratique.
En résumé
L’aïkido n’est pas une religion,
mais il intègre des éléments spirituels et philosophiques issus du shintoïsme,
du kototama et d’autres traditions japonaises.
Ueshiba utilisait ces outils
pour développer la conscience,l’énergie et l’efficacité martiale, sans en faire
des dogmes.
La pratique reste ouverte : chacun peut y trouver une
dimension spirituelle ou simplement technique, selon sa sensibilité.
2. L’Homme, le Ki et l’Illusion du Temps : Une Vision Orientale
1. La Religion comme Construction Humaine
Dans la tradition orientale (notamment shintoïste et taoïste), la « religion » au sens
occidental — avec ses dogmes, ses institutions et ses séparations entre sacré et profane
— est souvent perçue comme une superstructure humaine, une tentative de catégoriser et
de contrôler ce qui, par nature, est indivisible et fluide.
Pas de séparation entre homme et divin :
L’homme n’est pas «
devant » ou « après » le sacré, il en est une manifestation. Le ki (énergie
vitale) circule en lui comme dans l’univers ; il n’y a pas de rupture, mais une
continuité.
Pas de salut à chercher :
Contrairement aux religions occidentales, il n’y a pas de « péché originel » ni
de rédemption à obtenir.
L’homme est déjà partie prenante du ki cosmique, immortel et éternel.
Citation de Morihei Ueshiba :
« L’aïkido est la voie de l’unification avec l’univers. Il n’y a ni début ni fin, ni
bien ni mal, seulement l’harmonie du ki. »
2. Le Ki Cosmique : Immortalité et Non-Dualité
Le ki n’a ni naissance ni mort :
Il se transforme, circule, mais ne disparaît jamais.
L’homme, en tant que manifestation du ki, participe à cette immortalité.
Corps et esprit ne sont pas séparés :
En Occident, on oppose souvent matière et esprit, corps et âme. En Orient, le
corps est un véhicule du
ki, l’esprit en est une autre expression — les deux sont inséparables, comme les
deux faces d’une même pièce.
Passé, présent, futur coexistent :
Le temps linéaire est une illusion.
Tout existe simultanément, dans un éternel présent.
La pratique de l’aïkido, par le mouvement et la respiration, permet de ressentir
cette réalité.
Exemple :
Quand Ueshiba parlait de « devenir un avec l’univers », il ne parlait pas d’une fusion
mystique lointaine, mais d’une expérience directe, accessible ici et maintenant, par la
pratique martiale et la conscience du ki.
3. L’Aïkido comme Pratique de l’Unité
Dans cette perspective, l’aïkido n’est ni une religion ni une simple technique de
combat, mais une voie (do) pour :
Dépasser les illusions (ego, temps, séparation) ;
Retrouver l’unité originelle avec le ki cosmique ;
Agir en harmonie avec le flux universel, sans résistance ni
conflit.
Le furitama et le kototama ne sont pas des rituels religieux, mais des outils concrets
pour :
Vibrer en accord avec le ki (par les sons, la respiration) ;
Purifier les blocages (physiques, mentaux, énergétiques) ;
Manifester l’unité dans chaque mouvement.
4. La Tradition Orientale et la Pratique Martiale
Pas de dualité :
Il n’y a pas de « bien » ou de « mal »,
seulement des déséquilibres à harmoniser. L’aïkido ne « combat » pas
l’adversaire, il restaure l’équilibre du ki.
Pas de but à atteindre :
La pratique n’est pas un moyen pour
arriver à une fin (comme le « salut » en religion), mais une fin en soi
— chaque instant de pratique est une réalisation de l’unité.
Pas de séparation entre pratique et vie quotidienne : L’aïkido
ne s’arrête pas sur le tatami. C’est une façon d’être au monde, de marcher, de
respirer, de vivre en conscience du ki.
En Résumé
La religion (au sens occidental) est une illusion :
Elle crée des catégories (dieux, hommes, temps) là où la tradition orientale
voit un tout indivisible.
L’homme est le ki, et le ki est immortel : Il n’y a rien à «
sauver », seulement à réaliser ici et maintenant.
L’aïkido est une pratique de l’unité :
Pas une religion, pas une philosophie, mais une expérience directe de la
non-séparation.
3. Kototama et rapport avec le shintō
Le Kototama (言霊) est un concept profond et fascinant de la culture
japonaise,
étroitement lié au shintō (神道) , la voie spirituelle traditionnelle du
Japon.
1. Le mot kototama signifie
littéralement « âme des mots » ou « esprit des mots ». Il
repose sur l’idée que les sons, les mots et les syllabes possèdent une puissance
spirituelle, capable d’influencer la réalité, de purifier, de guérir ou de créer.
Cette croyance est au cœur de nombreuses pratiques shintō et bouddhistes japonaises.
2. Origines et liens avec le Shintō
Shintō :
Religion autochtone du Japon, centrée sur le respect
des kami (divinités ou esprits de la nature). Le shintō accorde une grande
importance à la pureté, à l’harmonie et à la communication avec les kami.
Kototama :
Dans le shintō, les mots ne sont pas de simples
outils de communication, mais des vecteurs de pouvoir spirituel.
Les prières, les incantations et les noms sacrés sont considérés comme capables
d’attirer la bienveillance des kami ou de repousser les influences négatives.
3. Les 50 sons du Kototama
Le système du kototama repose sur les 50 sons de la langue japonaise (les on),
organisés en un tableau appelé gojūon (五十音). Chaque son est associé à une vibration, une
énergie et une signification spirituelle.
Par exemple :
A : Représente la lumière, l’unité, le commencement.
I : Symbolise la volonté, la concentration.
U : Évoque la croissance, l’expansion.
E : Lié à la joie, à la gratitude.
O : Représente l’infini, la complétude.
Ces sons sont utilisés dans les mantras, les prières et les
rituels pour harmoniser l’énergie.
4. Pratiques et rituels
Norito (祝詞) :
Prières shintō récitées lors des cérémonies, où
chaque mot est choisi pour son pouvoir kototama.
Mantras :
Dans le bouddhisme japonais (notamment l’école
Shingon), les mantras sont des formules sacrées dont la prononciation exacte est
cruciale pour leur efficacité.
Noms :
Au Japon, le choix d’un nom (pour une personne, un
lieu, un objet) est souvent fait en tenant compte du kototama, pour attirer la
chance ou la protection.
5. Kototama et culture japonaise
Calligraphie : L’art de l’écriture (shodō) est aussi une
pratique kototama, car chaque trait porte une intention spirituelle.
Arts martiaux : Certains arts martiaux japonais intègrent des
incantations ou des cris (kiai) basés sur le kototama pour focaliser l’énergie.
Médecine traditionnelle :
Des formules kototama sont parfois
utilisées pour la guérison, en complément des remèdes.
4. Morihei Ueshiba le fondateur de l’Aïkido
Morihei Ueshiba (植芝 盛平, 1883–1969), le fondateur de l’Aïkido, a profondément intégré
les principes du kototama dans sa pratique martiale et sa philosophie, notamment sous
l’influence de sa participation à la secte Ōmoto-kyō (大本教) dirigée par Onisaburo Deguchi
(出口王仁三郎).
Voici comment le kototama a marqué son approche de l’Aïkido et sa spiritualité :
1. Influence d’Ōmoto-kyō et de Deguchi Onisaburo
Ōmoto-kyō :
Mouvement religieux syncrétique japonais,
mélangeant shintō, bouddhisme, christianisme et chamanisme, avec une forte
emphase sur la purification, la paix mondiale et la puissance des mots sacrés.
Deguchi Onisaburo :
Mystique et charismatique, il enseignait
que les sons et les mots (kototama) pouvaient transformer la réalité, guérir, et
même influencer le cours de l’histoire.
Ueshiba fut son disciple et intégra ces enseignements dans sa vision de
l’Aïkido.
2. Kototama dans la pratique de l’Aïkido
Ueshiba considérait l’Aïkido comme une « voie de l’harmonie » (合気道), où la technique
martiale n’est qu’un aspect d’une quête spirituelle plus large.
Le kototama y joue plusieurs rôles :
a. Incantations et mantras
Ueshiba utilisait des mantras et des sons sacrés (comme « A-Un
», « Hi-Fu-Mi »,
ou des syllabes issues du kototama) pour purifier l’espace, se centrer avant un
entraînement, ou harmoniser l’énergie (ki) avec celle de l’adversaire.
Ces sons étaient souvent récités en silence ou à voix haute, parfois accompagnés
de gestes rituels.
b. Respiration et vocalisation
La respiration (kokyū) et la vocalisation (kiai) sont essentielles en Aïkido.
Ueshiba enseignait que prononcer certains sons (comme « Ei! » ou « To! ») au bon
moment permettait de canaliser le ki et de renforcer la puissance des
mouvements.
Ces sons sont choisis pour leur vibration, leur lien avec les éléments (feu,
eau, terre, etc.) et leur capacité à « couper » l’énergie adverse.
c. Purification et protection
Avant de commencer un entraînement ou un rituel, Ueshiba purifiait souvent le
dōjō en récitant des prières shintō ou des formules kototama, pour chasser les
énergies négatives et inviter la présence des kami.
Il utilisait aussi des talismans (ofuda) et des calligraphies sacrées, où les
caractères étaient choisis pour leur pouvoir kototama.
3. Philosophie et spiritualité
Unité avec l’univers :
Pour Ueshiba, le kototama était une façon de se connecter à l’énergie
universelle (ki), de réaliser l’unité entre soi, l’adversaire et le cosmos.
Non-violence :
L’Aïkido n’est pas une technique de combat, mais une voie de paix.
Le kototama, en tant que pouvoir de transformation par la parole et le son,
reflète cette quête d’harmonie et de résolution pacifique des conflits.
Guérison :
Ueshiba croyait que les sons kototama pouvaient guérir, aussi bien physiquement
que spirituellement, et intégrait cette dimension dans sa pratique.
4. Exemples concrets
« A-Un » :
Ce mantra, symbolisant le début et la fin, l’inspiration et l’expiration, était
souvent utilisé pour harmoniser le souffle et l’énergie.
« Hi-Fu-Mi » :
Une séquence kototama liée à la création, à la purification et à la
transformation, que Ueshiba mentionnait dans ses
enseignements.
Calligraphies :
Ueshiba écrivait des caractères sacrés (comme « Ai » 愛, amour, ou « Ki » 気,
énergie) en les chargeant d’intention kototama.
5. Liens entre Ōmoto-kyō (大本教) et l’Aïkido
Les liens entre Ōmoto-kyō (大本教) et l’Aïkido sont profonds
et ont marqué à la fois la vie de Morihei Ueshiba et la philosophie de son art martial.
1. Contexte historique et rencontre
Ōmoto-kyō : rappels précédents
Fondé à la fin du XIXe siècle, ce mouvement
religieux japonais syncrétique puise dans le shintō, le bouddhisme, le
christianisme et le chamanisme.
Il prône la purification spirituelle, la paix
mondiale et la venue d’un « âge d’or » (Miroku no yo).
Morihei Ueshiba :
Après une crise spirituelle et une quête de sens, Ueshiba rencontre Onisaburo
Deguchi, le second guide spirituel
d’Ōmoto-kyō, en 1919.
Cette rencontre marque un tournant dans sa vie et dans le développement de
l’Aïkido.
2. Influence spirituelle et philosophique
Purification et harmonie :
Ōmoto-kyō enseigne que la
purification de l’esprit et du corps permet d’harmoniser l’individu avec
l’univers. Ueshiba intègre cette idée dans l’Aïkido, où la technique martiale
devient un moyen de purifier et d’unifier le ki (énergie vitale).
Non-violence et paix :
Ōmoto-kyō prône la résolution
pacifique des conflits et la création d’un monde sans guerre. Ueshiba,
profondément marqué par cette vision, conçoit l’Aïkido comme un « art de la paix
», où la victoire sur soi-même prime sur la défaite de l’adversaire.
Kototama et pouvoir des mots :
Comme évoqué précédemment,
Deguchi enseignait que les sons et les mots sacrés (kototama) pouvaient
transformer la réalité. Ueshiba utilise ces principes pour développer une
pratique martiale où la respiration, la vocalisation et l’intention spirituelle
sont aussi importantes que le mouvement physique.
3. Pratiques communes et rituels
Rituels de purification :
À Ōmoto-kyō, les rituels de
purification (misogi) sont centraux. Ueshiba adopte ces pratiques dans l’Aïkido,
notamment à travers des exercices de respiration, des ablutions, et des
incantations avant l’entraînement.
Méditation et visualisation :
Les adeptes d’Ōmoto-kyō
pratiquent la méditation et la visualisation pour se connecter aux kami
(esprits) et à l’énergie universelle. Ueshiba encourage ses élèves à méditer et
à visualiser le flux du ki pour améliorer leur pratique martiale.
Cérémonies et calligraphies :
Ueshiba utilise des
calligraphies sacrées et des talismans (ofuda) inspirés d’Ōmoto-kyō pour
protéger le dōjō et bénir les pratiquants.
4. Impact sur la technique de l’Aïkido
Mouvement circulaire :
L’Aïkido se caractérise par des
mouvements circulaires et fluides, reflétant la vision cyclique du temps et de
l’énergie dans Ōmoto-kyō.
Utilisation du ki :
La maîtrise du ki est au cœur de l’Aïkido.
Ueshiba enseignait que le ki pouvait être dirigé par la volonté et la
concentration, une idée directement inspirée des enseignements d’Ōmoto-kyō sur
l’énergie spirituelle.
Intégration du kototama :
Les sons sacrés et les incantations
sont utilisés pour renforcer la connexion entre le corps, l’esprit et l’univers,
et pour donner une dimension spirituelle à la pratique martiale.
6. Controverses et distances
Conflits avec les autorités :
Ōmoto-kyō a été persécuté par le gouvernement japonais dans les années 1920 et
1930, en raison de ses idées
pacifistes et de son opposition à la militarisation.
Ueshiba, bien que proche du mouvement, a toujours gardé une certaine distance
pour protéger l’Aïkido.
Évolution de l’Aïkido :
Après la guerre, Ueshiba et ses élèves ont parfois minimisé les liens avec
Ōmoto-kyō pour faciliter la diffusion de l’Aïkido à l’étranger, où les aspects
spirituels étaient moins compris ou acceptés.
On retiendra
Deguchi Onisaburo a offert à Ueshiba un cadre spirituel et philosophique qui a
transformé sa pratique martiale en une voie d’éveil et de paix. Le kototama, la
purification, la non-violence et la quête d’harmonie universelle sont des héritages
directs d’Ōmoto-kyō, toujours présents dans l’Aïkido tel qu’enseigné par Ueshiba.
Deguchi a transmis à Ueshiba l’idée que chaque son, chaque syllabe japonaise, porte une
vibration sacrée capable de transformer la réalité. Ueshiba a intégré cette philosophie
dans l’Aïkido, notamment à travers la respiration, la vocalisation (kiai) et l’usage de
mantras comme « A-Un » ou « Hi-Fu-Mi » pour purifier et harmoniser l’énergie (ki).
L’influence sur la pratique quotidienne d’Ueshiba.
À Ayabe, Ueshiba a vécu et pratiqué selon les principes d’Ōmoto-kyō :
Il a cultivé la terre, médité, et intégré les rituels de purification (misogi)
dans sa routine.
Il a utilisé des calligraphies sacrées et des talismans (ofuda) pour protéger
le dōjō et bénir les pratiquants, s’inspirant directement des pratiques
enseignées par Deguchi
Le kototama est une pratique vivante, qui peut enrichir aussi bien une
discipline
martiale qu’une quête spirituelle personnelle. L’essentiel est d’y mettre une
intention claire, une présence attentive et un
respect pour la tradition, tout en l’adaptant à votre propre chemin.
6. Le Chinkon Kishin (鎮魂帰神) et l’aïkido de Morihei Ueshiba
Le Chinkon Kishin (鎮魂帰神) est un ensemble de pratiques spirituelles et rituelles issues
du shintoïsme et de traditions mystiques japonaises, qui ont profondément influencé
l’aïkido de Morihei Ueshiba, le fondateur (O-sensei).
1. Qu’est-ce que le Chinkon Kishin ?
Le Chinkon Kishin peut être décomposé en deux parties :
Chinkon (鎮魂) :
Littéralement « pacification de l’âme », il s’agit de calmer l’esprit, de
purifier le cœur et de se recentrer.
Cela inclut des exercices de respiration, de méditation et de concentration pour
harmoniser
l’énergie vitale (ki).
Kishin (帰神) :
Signifie « retour à l’esprit divin » ou « union avec le divin ».
Cela implique une recherche de connexion avec le sacré,
l’universel, ou le « kamisama » (divinité shinto), souvent par des prières, des
incantations (norito) et des rituels de purification.
Ces pratiques sont issues du Shintoïsme , de l’Omoto-kyo (mouvement
religieux auquel
Ueshiba a adhéré), et de traditions mystiques japonaises comme le
Shugendo ou le Misogi .
2. Les apports du Chinkon Kishin dans l’aïkido d’O-sensei
a. Dimension spirituelle et philosophique
Unification du corps et de l’esprit :
Ueshiba considérait quela maîtrise martiale ne pouvait être atteinte sans une
purification spirituelle.
Le Chinkon Kishin permet de développer une conscience aiguë de soi et de son
environnement, essentielle pour l’aïkido.
Harmonie avec l’univers :
L’aïkido n’est pas seulement un art martial, mais une voie (do) vers l’harmonie
avec le ki universel.
Le Chinkon Kishin aide à ressentir cette énergie et à s’y connecter.
b. Pratiques concrètes intégrées à l’aïkido
Respiration et méditation :
Les exercices de respiration(kokyu) et de méditation avant ou après la pratique
visent à purifier l’esprit
et à préparer le corps à recevoir le ki.
Rituels de purification :
Ueshiba utilisait des prières
(norito), des gestuelles sacrées (mudra), et des purifications (misogi) pour se
préparer mentalement et spirituellement à l’entraînement.
Développement du ki :
Le Chinkon Kishin permet de cultiver
et de maîtriser son énergie interne, ce qui se traduit dans l’aïkido par une
puissance et une fluidité de mouvement sans effort apparent.
c. Influence sur la technique
Non-résistance et fluidité :
La pratique spirituelle enseigne à ne pas s’opposer à la force adverse, mais à
la guider, principe central de l’aïkido.
Présence et intention :
Le Chinkon Kishin développe une présence mentale totale, ce qui permet
d’anticiper et de réagir avec justesse, sans hésitation ni agressivité.
Un héritage spirituel et martial
Le Chinkon Kishin n’est pas une simple préparation mentale, mais le cœur même de la
vision d’O-sensei : un art martial qui transcende la technique pour devenir une voie de
développement personnel et spirituel.
Cependant, comprendre le Chinkon Kishin permet de saisir la profondeur et l’originalité
de l’aïkido tel que conçu par son fondateur.
1. Rituels de purification (Misogi)
Misogi no Kokyu :
Exercices de respiration purificatrice, souvent pratiqués tôt le matin ou avant
l’entraînement.
Ueshiba insistait sur des respirations profondes et rythmées, parfois
accompagnées de sons (comme le «
Suu » ou « Haa ») pour expulser les impuretés et harmoniser le ki.
Ablutions (Misogi-shuho) :
Ueshiba et ses élèves utilisaient parfois des ablutions à l’eau froide (sous une
cascade ou avec un seau) pour
purifier le corps et l’esprit, une pratique inspirée du shintoïsme et du
shugendo.
2. Prière et incantations (Norito)
Norito du matin :
Ueshiba récitait des prières shinto ou des textes de l’Omoto-kyo pour invoquer
la protection des kamis (divinités) et
purifier l’espace de pratique.
Ces prières étaient souvent suivies d’un moment de silence et de concentration.
Kotodama :
L’utilisation de mots sacrés ou de sons (comme «
A-Un ») pour canaliser l’énergie spirituelle et renforcer l’intention pendant la
pratique.
3. Méditation et concentration (Mokuso)
Mokuso avant/après l’entraînement :
Comme dans d’autres arts martiaux, Ueshiba encourageait ses élèves à méditer en
position seiza, les yeux
fermés, pour calmer l’esprit et se préparer à recevoir l’enseignement.
Visualisation du ki :
Exercices de visualisation pour sentir le ki circuler dans le corps et dans
l’espace autour de soi, une pratique
essentielle pour développer la sensibilité nécessaire à l’aïkido.
4. Rituels de connexion au divin (Kishin)
Offrandes et autels :
Dans certains dojos, on trouve un kamidana (autel shinto) où sont déposées des
offrandes (riz, sel, saké) pour
honorer les kamis et les ancêtres.
Mudras et gestuelles sacrées :
Ueshiba utilisait parfois des gestuelles inspirées du shinto ou du bouddhisme
ésotérique pour se connecter à
l’énergie divine avant de pratiquer.
5. Intégration dans la pratique martiale
Respiration synchronisée avec le mouvement :
Les techniques d’aïkido sont souvent exécutées en coordination avec la
respiration, ce qui permet de canaliser le ki et d’agir avec plus de puissance
et de fluidité.
Pratique en silence :
Ueshiba insistait sur l’importance de pratiquer dans un état de calme intérieur,
sans agitation mentale, pour que le mouvement naisse de l’intention pure et non
de la force physique.